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Département Biologie, Ecologie
et Evolution (BEE)

 

Perspectives et outils d'aménagement et de gestion

Protection et gestion du patrimoine naturel communal

Objectifs à poursuivre

Les objectifs liés à la prise en compte du patrimoine naturel au sein d'un territoire communal peuvent être répartis en trois volets principaux :

- les mesures de conservation sont liées aux milieux de grand intérêt écologique pour lesquels des mesures de protection sont nécessaires; on peut, entre autres, envisager la mise sur pied de réserves naturelles, l'adoption de conventions de partenariat, l'information et la sensibilisation des citoyens;

- les mesures de gestion visent à maintenir ou à réhabiliter des milieux d'intérêt qui participent généralement au maillage écologique : gestion écologique des bords de route, des landes, pelouses sèches, prairies humides, milieux forestiers, mise en place de pratiques agricoles compatibles avec l'environnement, etc.;

- les mesures d'aménagement ont, entre autres, pour objet la réhabilitation de sites, l'amélioration et le développement du maillage écologique : la réalisation de plantations diverses (arbres, haies, vergers de hautes tiges), la création de plans d'eau, de jardins sauvages, de milieux secs (pierriers, gravières), la renaturation des cours d'eau, etc., mais aussi :

- la mise en valeur des circuits de promenade à caractère pédagogique ou didactique;
- l'aménagement des zones ou réserves éducatives à proximité des écoles et de certains bâtiments publics;
- l'aménagement des habitats pour l'accueil de certaines espèces, comme les chauves-souris, les rapaces nocturnes, le martin-pêcheur, par exemple.

La réalisation de ces objectifs implique qu'ils s'accompagnent ou soient idéalement précédés d'une information et d'une sensibilisation des citoyens à ces préoccupations écologiques. Impliquer directement ceux-ci dans la réalisation des projets constitue souvent la meilleure assurance de réussite.

Dans le souci d'être efficace pour mener une telle politique de valorisation du patrimoine naturel, un certain nombre de priorités sont à respecter. Les objectifs de protection sont bien souvent prioritaires en raison des menaces sérieuses qui pèsent sur de nombreux sites d'intérêt biologique. Néanmoins, ces préoccupations ne doivent pas occulter les autres objectifs de gestion écologique des milieux, ainsi que les perspectives de développement de la structure écologique, même si les modalités de réalisation sont encore à définir.

Un outil tel que le Plan communal de Développement de la Nature constitue un document pratique et opérationnel qui permet d'établir un catalogue des propositions hiérarchisé en objectifs à court, moyen et long terme. Ce type de présentation permet de tenir compte du degré d'urgence pour assurer la conservation de certains sites, soit parce qu'ils sont voués à se modifier faute d'une gestion appropriée, soit parce qu'ils peuvent être menacés à plus ou moins brève échéance.

Moyens d'action

En Région wallonne, avec le cadre juridique existant, les moyens d'action des communes pour assurer la protection et la gestion du patrimoine naturel situé en dehors de ses propriétés foncières sont - il faut bien l'avouer - assez limités.

Indépendamment des mesures de police visant à faire respecter différentes réglementations en matière d'environnement (luttes contre le bruit, la pollution de l'air et des eaux, le contrôle des établissements classés comme dangereux, incommodes ou insalubres, les déchets ménagers), les communes ne disposent finalement que d'un contrôle, plus ou moins contraignant, sur les procédures d'octroi des permis de bâtir et de lotir, en particulier lorsque la commune est dans le régime de décentralisation et de participation en aménagement du territoire (voir ci-après).

Malgré ce contexte a priori peu favorable, certaines pistes existent néanmoins et méritent d'être suivies par les communes désireuses d'améliorer leur patrimoine naturel.

On distinguera, d'une part, les terrains dont la commune a la maîtrise foncière et les autres propriétés publiques et, d'autre part, les propriétés privées.

Sur les propriétés communales, les possibilités de gestion et d'aménagement écologiques sont bien entendu réelles s'il existe une véritable volonté de la part des autorités communales. Signalons par ailleurs que l'affectation désignée au plan de secteur pourra souvent être déterminante pour les objectifs susceptibles d'être poursuivis. Pour certaines propriétés publiques, la commune pourrait aussi rechercher des possibilités d'accords (contrats de gestion ou d'aménagements) avec les propriétaires et gestionnaires concernés.

Sur les propriétés privées, les moyens d'actions sont nettement plus limités. Les mesures coercitives (respect des textes législatifs et des réglementations) ont déjà été évoquées ci-avant. Elles relèvent de plusieurs législations : l'aménagement du territoire et le classement des sites (Commission royale des Monuments, Sites et Fouilles de la Région wallonne), la conservation de la nature (réserves naturelles et zones humides d'intérêt biologique).

Dans le cadre du régime communal de décentralisation et de participation en aménagement du territoire, un certain nombre de préoccupations d'ordre écologique et paysager peuvent aussi être mises en évidence. Ce régime implique, entre autres, l'adoption d'un schéma de structure et d'un règlement communal d'urbanisme, qui devront intégrer diverses données écologiques.

Le schéma de structure communal constitue, en particulier, un outil intéressant. Il est défini comme un document d'orientation, de gestion et de programmation du développement de l'ensemble du territoire communal. C'est lui qui sera amené à définir les principales lignes de conduite du projet communal de développement. Néanmoins, ces documents d'aménagement du territoire apparaissent peu contraignants en dehors des procédures liées au permis de bâtir. Le schéma de structure n'a de plus qu'une valeur indicative; il n'est pas opposable au tiers. Néanmoins, le schéma de structure n'est pas qu'un outil planologique. C'est aussi une sorte de contrat souple qui vise à articuler des objectifs d'aménagement et de gestion du territoire avec des moyens d'exécution. Il doit idéalement déboucher sur un programme opérationnel d'actions qui s'impose aux tiers comme à la commune.

Les mesures du règlement communal d'urbanisme ne concernent que des prescriptions pour des actes et travaux qui sont liés à une construction, à une installation et à leurs abords ainsi qu'à la voirie, à ses accès et à ses abords. De plus, ce règlement ne peut s'appliquer qu'aux actes et travaux nécessitant un permis de bâtir. Ces aspects limitent donc singulièrement les dispositions réglementaires qu'un pouvoir local pourrait souhaiter imposer hors du cadre construit, notamment pour la protection des zones intéressantes des points de vue écologique et paysager.

Dans une optique nouvelle de remembrement rural (une nouvelle législation est en préparation), il serait également possible de réorganiser la production agricole en intégrant des préoccupations de conservation ou de redéploiement de la structure écologique du paysage. On peut espérer que ces quelques pistes prometteuses pourront faire leurs preuves à l'avenir.


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Il convient pourtant de rappeler que les seules mesures coercitives sont insuffisantes pour préserver la biodiversité. Il est aussi indispensable de rechercher des formules incitatives pour gérer et aménager de manière plus écologique un certain nombre d'espaces et de milieux intéressants pour les espèces sauvages. Ces «aides» à la conservation recouvrent de multiples aspects dont beaucoup ne sont pas nécessairement de la compétence communale. Diverses pistes méritent cependant d'être suivies pour atteindre ces objectifs (DE KLEMM, 1992) :

- éliminer les obstacles juridiques à la conservation (par exemple, affectation défavorable au plan de secteur);
- mettre en place des instruments juridiques, octroyer des subventions et des avantages fiscaux favorisant la conservation volontaire (réserves naturelles privées, p. ex.);
- donner des avis et des conseils aux particuliers et aux entreprises sur les meilleures façons de protéger et de gérer les milieux naturels.

Parmi ces mesures incitatives, quelques instruments principaux de conservation du patrimoine naturel peuvent être dégagés :

- les réserves privées, dont les associations de protection de la nature (R.N.O.B. Ardenne et Gaume, p. ex.) peuvent être favorisées par les pouvoirs publics au travers de subventions, notamment (Développement rural, Fonds pour la conservation de la Nature, aides régionales, etc.); la Région wallonne peut notamment reconnaître certains milieux naturels comme réserve naturelle agréée à la demande du propriétaire et avec l'accord de l'occupant;

- les subventions ou aides octroyées aux privés pour favoriser la gestion écologique dans les zones agricoles ou forestières (aides à l'entretien des haies, à la plantation, au boisement, à l'aménagement de zones humides, etc.); ces formules doivent idéalement comporter des garanties (contrat ou convention, voir ci-après), afin d'assurer une certaine pérennité au projet;

- les conventions de gestion qui peuvent être conclues entre une administration et un propriétaire foncier; les contrats peuvent imposer des restrictions à l'exercice de certains droits (mode d'exploitation, p. ex.) ou prescrire des travaux à exécuter, moyennant une compensation financière (indemnité pour manque à gagner et, éventuellement, rémunération pour services rendus); signalons cependant que de tels contrats personnels ne sont pas opposables aux successeurs et n'assurent donc pas nécessairement la conservation à long terme d'un site.

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Prof. :

Biologie de l'évolution et de la conservation

Réalisation :